Nicolas Chappuis : « A Zurich, on prend le train en marche et on s’adapte »

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Après une douzaine d’années dans le football genevois, l’entraîneur fait le grand saut au FC Zurich.

Le 30 juin dernier, Nicolas Chappuis terminait son dernier jour de boulot à l’Ecole Internationale de Genève. Le 4 juillet, il était déjà à l’académie du FC Zurich pour démarrer une nouvelle aventure. En effet, il vient de faire le grand saut et s’occupera d’une équipe M14 zurichoise l’année prochaine. Pour le moment, il n’est pas professionnel et a un contrat d’un an, mais nul doute que cela durera plus longtemps, tant il possède un profil à faire des envieux. A 26 ans seulement, il a dans son bagage douze années d’expérience dans le coaching déjà –5 à Chênois, 7 à Carouge–, mais surtout, il est l’heureux possesseur du diplôme A obtenu fin 2015 avec la note maximale (4/4).

Entretien avec un entraîneur consciencieux qui n’aime pas brûler les étapes et qui passera une année intense aux bords de la Limmat, entre cours à l’université, entraînements Footeco et perfectionnement du umlaut.

 

Proxifoot : Comment le FC Zurich et toi êtes entrés en contact ?
Nicolas Chappuis : J’ai passé mon diplôme A l’année passé, en même temps que Ludovic Magnin qui entraîne les M18 à Zurich. On a passé une année à faire les modules ensemble. Il a apprécié comment je travaillais et il a contacté ses responsables. Il faut savoir que je ne parle pas du tout allemand ! Et ils m’ont proposé une des deux meilleures équipes de M14 sur les quatre qu’a le club. Ils ne pouvaient pas me proposer un contrat pro, ce qui est normal la première année, mais ils m’ont fait comprendre qu’ils comptaient sur moi sur du long terme. Alors on s’est mis d’accord sur une année, en plus j’ai aussi l’université, et on fera le point à la fin de l’année.

Cette passion pour le coaching, c’est parce que tu n’avais plus envie de jouer ?
Je jouais à Chênois et j’ai intégré la première équipe à l’époque. Mais j’ai eu des problèmes d’épaule et j’ai subi plusieurs opérations. Cela ne s’est jamais vraiment rétabli, j’ai dû arrêter et je me suis orienté vers le coaching de manière plus poussée, car j’entraînais déjà des petits à Chêne. J’ai aussi fait arbitre une demi-saison, mais je n’ai pas trop aimé (rires).

Quand est-ce que tu es arrivé à Carouge ? As-tu toujours eu des M14 ?
J’ai fait 5 ans à Chênois, des Juniors E jusqu’aux C inter. La dernière année, Georges Favre est parti de Chênois à Carouge et m’a demandé si je voulais le suivre, j’ai accepté. J’ai fait 7 ans à Carouge, la majorité avec les M14, mais j’ai aussi eu les E, les M15 et j’ai été assistant M16. Je remercie Dominique Vergnaud, responsable technique, qui a “osé” me donner les M14 car je n’avais pas vraiment d’expérience dans le foot à 11. C’était une grande preuve de confiance. Et c’est ce qui a tout lancé en fait, car le fait d’avoir des M14 si tôt m’a ouvert les portes de tous les diplômes, car il y a pas mal d’exigences.

C’est une volonté de ta part de te spécialiser dans la tranche d’âge M14 ?
Il y a des entraîneurs qui aiment bien suivre les joueurs sur plusieurs années. Moi je ne suis pas forcément pour, je préfère rester dans une catégorie pour bien la maîtriser. Je ne me considérais pas vraiment performant dans mon rôle d’entraîneur M14 jusqu’à l’obtention de mon diplôme A il y a quelques mois. C’est seulement depuis que je l’ai que je me considère vraiment à l’aise avec cette catégorie. Maintenant, je me sens prêt pour attaquer les M15 ou M16, mais j’aime tellement être efficace dans ce que je fais, que cela ne me dérangerait pas de faire encore quelques années de M14. Je pense qu’il y a des entraîneurs qui font l’erreur de vouloir monter trop tôt, avant de vraiment maîtriser la catégorie dans laquelle on est. Ce n’est que mon avis, bien sûr.

Chappuis, Vergnaud, Sutter et quelques joueurs

Quel est ton objectif à long terme ?
Honnêtement, je n’arrive pas à me projeter plus haut que les M16 à l’heure actuelle. L’année dernière, on m’a demandé si j’étais intéressé pour reprendre une équipe de 2ème ligue inter. Mais j’ai refusé, je n’ai pas assez d’écart d’âge avec les joueurs. Sur le moyen terme, je suis focalisé dans les M15-M16 et laisser passer les années dans ces catégories-là. Ensuite, peut-être voir autre chose que du Footeco et entrer vraiment dans l’élite pure.

Est-ce que tu te vois vivre de ça ?
Je pense que ceux qui sont vraiment passionnés aimeraient vivre de ça, dans l’idéal. Mais moi j’ai toujours continué mes études à côté. Je n’ai pas envie d’être dépendant du foot. Si cela ne marche pas, je veux toujours avoir une porte de sortie ailleurs, dans un autre domaine. Je préfère avoir le choix.

Qu’est-ce qui change le plus quand tu arrives au centre de formation du FC Zurich ?
Déjà, au niveau des infrastructures, c’est un gros choc. Si on compare, on a pas mal de retard à Genève. A Zurich, il y a 15 terrains d’entraînement et j’en ai un entier pour mon équipe, avec 8 buts mobiles. J’ai une tranche horaire de deux heures et demie, trois heures, alors qu’à Genève, c’est une heure et demie grand max, c’est compliqué. Ensuite, au niveau de l’approche, c’est totalement différent. Déjà, j’arrive dans un club qui a une réelle philosophie au niveau des jeunes, en place depuis des années. Il y a deux jours, j’ai eu un entretien avec le responsable technique, on m’a donné la “Bible” du FC Zurich, avec comment ils veulent qu’on travaille des petites catégories jusqu’aux plus grandes, etc. Ça, il n’y a pas à Genève malheureusement. Zurich est un club stable, quand il y a des nouvelles personnes comme moi qui arrivent, on prend le train en marche et on s’adapte à ce qui est en marche. A Genève, cela change non-stop, les personnes bougent tout le temps, les manières aussi.

Toi qui maîtrises bien la catégorie M14, quelle est ton opinion sur la philosophie Footeco et qu’a-t-elle permis d’améliorer à Genève ?
Je pense déjà que Footeco a permis d’améliorer les partenariats avec d’autres clubs. La collaboration est nettement meilleure et les joueurs sont plus vite filtrés, ce qui est déjà plus intéressant en termes de recrutement. Si on rate un très bon joueur via Footeco, c’est de notre faute, celle des techniciens. Le système de cellules est bien fait et c’est difficile de rater des bons joueurs, même s’il y a toujours des exceptions. En termes footballistiques, le bon côté de Footeco c’est la formule à trois tiers de 30 minutes, où on doit faire jouer minimum un tiers par joueur. J’ai connu l’avant-Footeco et parfois les entraîneurs faisaient rentrer des joueurs M14 à 10 minutes de la fin, c’est compliqué pour les faire progresser. Ce que je trouve bien également, c’est que l’atmosphère au bord du terrain est moins dirigée sur la compétition (même si on veut toujours gagner) et plus sur la progression du joueur, le coaching est plus orienté sur le jeu que sur l’enjeu. Dû à ça, l’évolution des joueurs a fait un bond en avant.
Après, il y a d’autres côtés qui sont discutables, comme le fait de jouer en M14 à 9 au premier tour et à 11 au second tour, sachant que l’année d’après c’est les M15 nationaux. Je pense qu’on pourrait faire jouer les M14 toute l’année à 11. C’est mon avis mais également celui de la majorité des entraîneurs. Sinon, il y a aussi cette tendance à amener les meilleurs joueurs à Servette. Je pense que en M14, c’est trop tôt. Car on joue à 9 au premier tour et donc si on regroupe tous les meilleurs au même endroit, ils auront moins de temps de jeu que si on les repartit en deux groupes. Par contre, en M15, c’est normal et essentiel de tous les mettre au SFC. Une solution pour les M14 serait que les meilleurs s’entraînent seulement 1-2 fois dans la semaine ensemble puis jouent dans leur club (SFC, Carouge, Meyrin, Team ACGF) le week-end pour bénéficier d’un temps de jeu optimal. Les M18 servettiens de Lombardo qui ont été champions suisses (volée 1997-1998) n’ont été regroupées qu’en M15 ou M16… donc ils n’ont finalement pas pris tant de retard que ça. A Zurich, les 16 meilleurs joueurs sont répartis sur deux équipes. Je pense que Footeco a ouvert les possibilités de gestion du partenariat et l’évolution des joueurs. C’est fini la guerre entre les clubs dans le partenariat. Et ça c’est vraiment bien.

Pour terminer, Kevin Bua vient de quitter ton nouveau club pour le FC Bâle. Que penses-tu de son parcours, lui a explosé dans le football régional des actifs ? Est-ce une exception ?
Bua était quand même dans le cursus élite à Servette jusqu’en M14 et n’a pas été gardé pour différents critères, sauf erreur. Donc il a quand même été sélectionné à la base. Je pense que c’est une question de personnes. Au moment où il y était, des personnes ont décidé qu’il n’était pas au niveau. Heureusement, il a pu rebondir. Je suis content pour lui, je l’ai croisé hier au centre d’entraînement. Je pense qu’il a su “crocher” et être revanchard quand il n’a pas été gardé au SFC. Contrairement à certains qui auraient abandonné. Moubandje est un bon exemple aussi. Mais ce sont des exceptions, c’est clair ! Il y aura toujours des exceptions. Il ne faut pas négliger ce qui est en dehors de l’élite, c’est pour ça que les ligues comme la 1ère ligue, 2ème ligue inter ou 2ème ligue sont importantes.

Un dernier mot ?
Je garde des super souvenirs de Chênois et surtout Carouge. J’espère que je les retrouverai, tôt ou tard. Si je devais garder un souvenir en particulier, c’est les voyages avec Greg Sutter des M13 ces dernières années en Hollande et Angleterre. Voir des autres cultures de jeu, échanger avec d’autres entraîneurs, c’est les meilleures expériences que j’ai pu vivre en tant qu’entraîneur. Donner du bonheur aux enfants en allant découvrir d’autres choses via le football, c’est magnifique.

 

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