Gianluca Nucera: «Partir à l’étranger te fait grandir rapidement»

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Voilà six saisons que Gianluca Nucera a quitté Genève pour s’installer du côté de Pavie, en Italie. Avec le club lombard, il vient de monter en Serie D aux côtés d’un certain Dylan Dugourd. Il raconte.

Les joueurs genevois évoluant à l’étranger connaissent tous une trajectoire différente. Mais ils ont un point commun: celui d’avoir franchi le pas et quitté leur nid natal. Né à Genève de parents italiens, Gianluca Nucera (21.07.1994) a connu les trois plus grands clubs formateurs du canton : Servette dès l’école de foot, puis Meyrin en juniors C, Carouge en M15-M16 et finalement Team Genève Servette-Carouge en M17.

C’est à ce moment-là qu’un club italien frappe à sa porte pour finir sa formation : Varese, au Nord de l’Italie. Mais sa trajectoire en Italie n’est pas du tout stable, pour un jeune joueur. Il reste un an à Varese, puis enchaîne avec des clubs aux profils différents comme Poggibonsi, Parme et Savona, sans vraiment jouer, entre 2013 et 2015.

Il aura même été prêté six mois à Malte en 2013-2014, une expérience particulière pour lui dans le club de Qormi: « J’avais 18 ans, j’étais jeune. On vivait à 6 dans un appart. Le championnat était malgré tout d’un bon niveau. Il y avait pas mal de Brésiliens et Fabrizio Miccoli a même fini sa carrière là-bas. Le problème, c’est que le club dans lequel j’étais prêté était très amateur. Il y a une très grosse différence à Malte entre les 2-3 plus gros clubs, qui jouent les tours préliminaires des compétitions européennes, et le reste. C’est un beau pays, mais le foot reste le plus important. Même si je jouais régulièrement, six mois, ça m’a suffi ».

Retour en Suisse et débuts avec Servette

Après ces expériences infructueuses (« j’ai fini par en avoir marre de l’Italie »), retour à sa Genève natale à l’été 2015 : « José Sinval m’a demandé de revenir à Servette. J’ai intégré les M21 et je m’entraînais parfois avec la première équipe ». En 2e ligue inter, Nucera joue régulièrement avec les M21 et fait même ses débuts en première équipe, qui évoluait alors en Promotion League : il entre en jeu contre Sion M21 lors de la dernière journée d’un championnat déjà remporté par les Genevois.

Mais l’aventure grenat s’arrête ici, le club ne lui propose plus rien et il est déjà trop âgé pour les M21. S’en suivent trois expériences en 1ère ligue : Fribourg, Azzurri LS et le CS Chênois de David Joye, où il joue principalement au poste de latéral gauche.

Sous les couleurs de Chênois

De la stabilité à Pavie

En 2019, l’appel de l’Italie frappe à nouveau. Et une équipe était pour lui une suite logique : l’AC Pavia, qui n’est autre que le club de… son père. « Le club avait fait faillite en 2016 avec des investisseurs chinois et mon père l’a repris en 2019. Au début, je me suis toujours refusé de jouer dans le club de mon père, je ne voulais pas être catégorisé comme “le fils du président”. Mais après, je me suis dit : “pourquoi pas ?” Je connaissais mon niveau et je voulais qu’on me juge uniquement sur mes qualités sportives ».

Le chantier était énorme pour le nouveau président Giuseppe Nucera, dont le club est en conflit avec les tifosi qui contestent la légitimité de la nouvelle entité et qui ont créé un club parallèle -Athletic Pavia- qui évolue lui en amateur. Le fiston détaille : « Mon père a tout repris de 0. La commune avait viré le club, il n’y avait plus d’équipes de jeunes, nous avions un vieux terrain à disposition à Milan. Il fallait tout reconstruire et, pour couronner le tout, les deux premières saisons ont été annulées à cause du Covid. Lors de la troisième saison, on s’est sauvé lors des playouts. Ensuite, le club a fini par trouver un directeur général et s’est mieux structuré ».

Promotion avec Dylan Dugourd

Il faut savoir que Pavia est un club historique du football italien, avec une base solide d’ultras, qui a même joué en Serie B dans les années 1950. Des années 1960 à jusqu’à la faillite de 2016, le club a quasiment tout le temps navigué entre la Serie C et la C2, l’ancien nom de la Serie D (quatrième division). Le voir évoluer en Eccelenza (5e division) était une anomalie historique qu’il fallait corriger, même si actuellement la ville est divisée entre le projet de Nucera et celui des supporters, notamment autour du logo et du nom historiques.

Après avoir échoué lors des playoffs de promotion en 2023 et 2024, ce retour tant rêvé en Serie D s’est concrétisé au mois de mai dernier : « Nous n’attendions que ça, c’était un grand soulagement. Si nous n’étions pas montés cette année, ça aurait été un problème (rires) ! », se remémore Gianluca.

Ironie de l’histoire, c’est avec un autre Genevois sur le terrain, Dylan Dugourd, que Pavia a été promu. L’ancien attaquant du Stade Nyonnais a répondu aux attentes placées en lui l’été dernier avec 12 buts, dont celui de la victoire lors de la finale des playoffs, et de nombreuses passes décisives. « Dylan, c’est un super joueur, il nous a fait du bien, Le club voulait le garder, mais il voulait rentrer à Genève », détaille-t-il sur son désormais ex-coéquipier qui vient de s’engager à Lancy.

 

 
 
 
 
 
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Objectif Serie C

Ce n’est en revanche pas le cas de Gianluca Nucera, qui a prolongé pour une septième saison du côté de Pavia et qui a encore faim, lui qui joue régulièrement au poste de latéral gauche : « Le club veut monter en Serie C maintenant. Je te parle en tant que joueur : j’aime les défis, la compétition. Je ne suis plus tout jeune, je n’ai plus l’âge pour faire une carrière professionnelle, mais je veux vivre encore à fond cette expérience à Pavia. J’espère que je pourrai jouer un jour en Serie C, je pense que j’en suis capable ».

Un retour à Genève n’est donc pas au programme. Bien qu’employé en Suisse, il a la chance de pouvoir exercer son job en télétravail depuis l’Italie, tout en s’entraînant tous les jours : « Genève ne me manque pas pour le moment, même si j’y suis né et que ma famille y habite. Si nous n’étions pas montés, je me serais posé la question. Mais un retour n’est pas tout de suite envisagé ». 

« Je le referais mille fois »

Gianluca Nucera fait partie de ces joueurs qui ont un jour osé franchir le pas et tenter une expérience à l’étranger. Entre l’envie et la concrétisation, il y a parfois un fossé, mais lui s’est lancé une première fois en 2013 et une seconde en 2019, et ne regrette pas : « En tant que jeune, partir à l’étranger est une expérience incroyable qui te fait grandir rapidement. Je le referais mille fois. Ce n’est pas toujours facile, mais c’est une expérience que je conseille à 100%, même aux parents qui ne veulent pas laisser partir leur fils. Quand tu es en troisième ou quatrième division suisse et que tu as l’opportunité d’aller en Serie D italienne, fais-le. Il faut savoir sortir de sa zone de confort. Je connais beaucoup de joueurs qui voulaient partir à l’étranger, et au moment de partir ont trouvé des excuses pour ne pas le faire. »

Au moment de faire le bilan, le latéral de 31 ans conclut, en guise de conseil : « J’ai beaucoup changé de club quand j’étais jeune, parce que j’ai été mal conseillé. Tu vas dans un club et après on t’abandonne, ce n’est pas évident. Mon père n’était pas encore dans le monde du foot à cette période. Peut-être que ça aurait été différent ».

En attendant la reprise du championnat de Serie D, les animosités entre les deux clubs de Pavie ne sont pas retombées pour autant. L’association de supporters vient de récupérer le nom et le logo historiques de l’AC Pavia, qui évolue en amateur. Le club de Nucera, lui, poursuit son activité en parallèle en semi-pro, et a dû changer cet été de logo et de nom, désormais Pavia Calcio. Mais l’ambitieux projet continue, malgré le manque de soutien populaire.

Les performances de Gianluca Nucera seront à suivre dans notre rubrique hebdomadaire des Genevois de l’étranger.

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