Aussi fatales en crampons qu’en talons : les footballeuses genevoises

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Malgrè un certain manque de visibilité, le football féminin a connu une croissance extraordinaire ces dernières années à Genève. Tour d’horizon et rencontres dans notre Canton.

Qui n’a pas entendu parler de Ronaldinho, Zidane et David Beckham, ou même Victoria Beckham pour citer une femme. Par contre, peu de gens connaissent Marta, Marinette Pichon ou Hope Powell, qui pourraient être considérées comme leurs équivalents féminins.
Les femmes jouent au football depuis la fin du XIXème siècle, mais il faudra attendre 1984 (UEFA) et 1991 (FIFA) pour que les compétitions féminines soient reconnues officiellement.  Il aura donc fallu attendre plus de temps pour le « droit de football » que pour le droit de vote !
En 1925, Henri Desgranges (directeur et rédacteur en chef de L’Auto) a dit : « Que les jeunes filles fassent du sport entre elles, dans un terrain rigoureusement clos, inaccessible au public : oui d’accord. Mais qu’elles se donnent en spectacle, à certains jours de fêtes, où sera convié le public, qu’elles osent même courir après un ballon dans une prairie qui n’est pas entourée de murs épais, voilà qui est intolérable ! »
Aujourd’hui encore, certains pensent comme lui, mais d’autres ont l’esprit plus ouvert et deviennent entraineurs d’une équipe féminine, supporters ou tout simplement admirateurs du talent de ces demoiselles.
Genève compte beaucoup de ces talentueuses joueuses et il est temps pour les équipes féminines de la région de se faire connaître.  L’ACGF recense sept clubs ayant une ou plusieurs équipes féminines. Petit tour d’horizon :
FC Acacias-Ville : 3ème ligue
FC Aïre-Le-Lignon
: 2ème ligue / Juniors B, C, D3, D4, E
FC Champel
: Juniors D
CS Chênois
: LNB / Juniors C, D4, D5
FC Signal Bernex Confignon
: 2ème ligue / Juniors C, D
FC Vernier
: Juniors D
FC Versoix
: 3ème ligue / Juniors C 

L’ORANGE VOUS VA SI BIEN

Evoluant sous cette couleur, on retrouve les filles d’Aïre-Le-Lignon. Le football féminin a débuté en 2005 dans ce club, avec trois équipes, dont deux juniors. Actuellement, le club compte plus de 90 joueuses, ainsi qu’une école de foot. Cela a notamment été rendu possible grâce à la campagne de publicité menée cet été.
La première équipe, néo-promue en 2ème ligue, s’est rapidement hissée en deuxième place du championnat, devançant Bernex (dont l’équipe féminine existe depuis 20 ans) qui se classe en quatrième position. Les filles peuvent compter sur le soutien d’un petit groupe de supporters présents à chacun de leur matchs et elles sont devenues des modèles pour les jeunes joueuses qui rêvent de devenir comme elles.

Nous avons rencontré Walid Taieb, leur entraineur, qui s’investit beaucoup dans le football féminin.

Quels sont vos objectifs ?
En ce qui concerne notre 1ère équipe, notre objectif était une promotion en 2ème ligue. Cet objectif avait été fixé pour juin 2009, mais nous avons réussi à l’atteindre en juin 2008.  Pour la saison actuelle, nous souhaitons éviter la relégation. Avec la 2ème place du championnat et notre forme actuelle, nous pouvons déjà être tranquilles. Il est bien clair qu’une promotion en 1ère ligue reste pour nous une priorité. Nous considérons cela comme un objectif à court terme. En ce qui concerne notre section féminine, nous voulions qu’elle soie reconnue comme un club formateur. Et nous sommes très fiers d’être le premier club à proposer une filière de formation complète pour les filles sur le canton.

Y a-t’il des avantages (ou des difficultés) à entrainer des femmes ?
Je ne parlerais pas d’avantage ou de difficulté. Disons plutôt que le football féminin s’opère dans une mentalité différente du football masculin. Les entraîneurs doivent faire preuve de plus de communication et être plus à l’écoute des joueuses.
Concernant la campagne publicitaire de cet été. Quelles ont été vos motivations?
La section féminine du FC Aïre-le-Lignon et le club dans son ensemble n’avaient pas une bonne image. Pour développer le mouvement féminin au sein du club, nous devions travailler notre image. Dès lors, nous avons lancé une campagne de publicité, en partenariat avec la Haute école d’art et de design de Genève. Cette campagne nous a permis de nous faire connaître. Nous avons eu une augmentation de plus de 100% de nos effectifs depuis son lancement. Et le phénomène ne s’arrête pas. Nous recevons tous les jours des demandes d’inscriptions.
Quel message aimeriez-vous faire passer ?
Je crois que deux messages me semblent importants. Tout d’abord, nous encourageons les filles à se rendre dans les différents clubs proposant une filière de formation complète afin de voir si elles souhaitent commencer la pratique de ce sport. Il est très important que le football féminin se développe en Suisse. Nous avons trop de retard par rapport à certains de nos voisins. Ensuite, certains clubs qui existent depuis plusieurs années demandent à changer les règles du football féminin pour les adapter aux mentalités des joueuses. Il est très important que les dirigeants des clubs se rendent compte que ce sont les mentalités dans le football féminin qu’il faut changer, et non les règles. Tant que nous ne comprendrons pas cela, il sera difficile de promouvoir le football féminin.
LES GENEVOISES EN FORCE

En Ligue Nationale B, les filles du CS Chênois se classent tout en bas du tableau, alors que la deuxième équipe du club mène le championnat de 3ème ligue 1er degré.  Pour ce qui est du 2ème degré, c’est l’équipe de Versoix qui se classe première, à 7 points d’écart du FC Acacias-Ville, classé 3ème.

Fausto Armeli, entraineur de cette dernière équipe nous parle de sa saison.

Pourriez-vous présenter votre équipe en quelques mots ?
Nous sommes une jeune équipe qui a vu le jour en août 2007 sous le nom de FC Acacias-Ville Féminin avec des files qui débutaient le foot. Le 1er tour a été très difficile, nous étions derniers du classement du groupe de 3ème ligue 2ème degré. Le 2ème tour s’est beaucoup mieux passé. De derniers du classement, nous sommes passés en zone de promotion pour la 3ème ligue 1er degré, mais nous n’avons pas pu monter pour des raisons de contingent.

Comment se déroule jusqu’à présent la saison ?
Cette saison se déroule assez bien. Nous avons toujours l’espoir de jouer les hauts de tableau en fin de saison pour pouvoir passer l’épaule, mais la priorité est de mettre en place une relève pour permettre à notre équipe d’évoluer dans les meilleures conditions. C’est pour cela que nous avons créé une nouvelle équipe féminine de juniors C qui évoluera dans le championnat des garçons dès le  mois de mars 2009, ainsi qu’une 3ème équipe active de 3ème ligue également qui devrait faire aussi ses début en championnat en mars 2009 pour autant que nous trouvions un entraîneur et encore quelques filles.

Quelles sont les différences avec une équipe masculine ?
Les différences entre filles et garçons,  sans pour autant être ” macho”,  sont assez importantes. Il faut savoir que le foot féminin est lent, beaucoup plus lent que celui des garçons, ce qui est dû au manque de masse musculaire. Beaucoup de problèmes de coordination se font sentir chez les filles, mais rien de dramatique, il faut juste plus de travail. La discipline chez les filles est hors du commun, un vrai régale, qui ferait jalouser les entraineurs des équipes masculines. Les contacts physiques chez les filles n’ont rien à envier aux garçons, je dirais même qu’ils sont plus durs. Les entrainements sont identiques à ceux des garçons. Le seul bémol est que les explications et consignes doivent être répétitives. Cela donne l’impression que rien n’est acquis, qu’elles ont tout oublié, mais le déclic arrive à leur rythme et généralement chez toutes en même temps, quand on s’y attend le moins.

Quel message aimeriez-vous faire passer ?
Tant que les clubs et certaines personnes ne prendront pas le foot féminin au sérieux, nous aurons beaucoup de peine à exister, surtout dans des clubs de ville. Il faut également savoir que le foot féminin est en pleine expansion et que nous nous battons tous les jours pour faire accepter des filles dans les clubs.

 

CHAMPIONNES EN DEVENIR

Pour finir, il ne faut pas oublier les joueuses juniors, l’avenir du football féminin. Mário Pereira nous présente avec humour l’équipe des juniors D féminines du FC Vernier.

Comment se déroule jusqu’à présent la saison ?
La saison se déroule bien, étant donné que les résultats ne sont pas notre priorité, ça va ! 4 matchs 4 défaites, mais nous n’avons rencontré qu’une équipe de filles et contre des garçons c’est difficile. Ils ont un plus grand esprit compétitif et nous avons aussi beaucoup de débutantes dans notre équipe. Nos objectifs sont le progrès et le plaisir de jouer de chacune des filles, marquer le plus grand nombre de buts et gagner contre une équipe de garçons si possible.
Y a-t il des avantages (ou des difficultés) à entraîner des filles ?
Difficile de comparer car c’est ma première équipe, mais s’il y a un avantage, dans mon cas précis, c’est d’être pionnier dans mon club et c’est de faire partie de quelque chose de beau, qui vient à peine de démarrer mais qui va aller très loin, et très vite. Aller très loin, c’est tout le mal que l’on peut souhaiter à nos équipes genevoises, ainsi qu’au football féminin en général. Cela prend du temps de changer les mentalités, mais toutes ces filles sont la preuve qu’il y a un avenir pour les footballeuses et, qui sait, peut-être qu’un jour on verra ces messieurs arborer fièrement des maillots aux noms de femmes.

Pour Proxifoot, Val  

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