Samuel Izquierdo : « Je veux rendre au football tout ce qu’il m’a donné »

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A presque 42 ans, le défenseur tire sa révérence après notamment deux décennies avec la première équipe du FC Collex-Bossy. Place maintenant à la transmission. Interview.

« Je ne vais pas m’éloigner du foot, je te rassure ». Samuel Izquierdo préfère être clair d’entrée, quelques jours après l’annonce officielle de sa retraite de footballeur. Sam, comme le connaît le petit monde du football genevois, incarne cet esprit de camaraderie d’un autre temps. Et quel autre club que Collex pour véhiculer ces valeurs ? Parce que 20 ans en première équipe, c’est vite dit. De 2003 à 2023, le polyvalent joueur –ailier puis latéral ses premières années, défenseur central sur la fin– a porté les couleurs d’une seule et unique équipe : la première du FC Collex-Bossy, un club qui « attire peu mais retient bien », comme l’avait parfaitement décrit Laurent Favre, journaliste au Temps.

Jeune, il a vite connu le monde des adultes, passant des M-16 du Grand-Lancy à la première équipe. Comme un signe annonciateur que le football dit des «actifs» était fait pour lui. A une période où les footballeurs n’hésitent pas à aller en vétérans une fois atteints les 30 ans non révolus, Izquierdo ne l’a jamais vu de cet oeil. Après un quart de siècle à parcourir les terrains genevois et romands en pratiquant le sport qui lui a tant donné –des promotions, des coupes, des matchs de Coupe Suisse mais surtout des rencontres–, il est temps pour lui de passer le flambeau et de transmettre cette passion qui reste intacte.

D’une famille de sportifs –son épouse Chloé Izquierdo est championne suisse de basket et leurs deux enfants sont dans la filière GEF–, le Genevois d’origine espagnole avait pourtant encore les jambes pour rempiler. Mais la priorité est ailleurs : suivre de plus près la carrière des bambins. L’un va intégrer les M15 du Servette FC la saison prochaine, l’autre les FE13 de Meyrin. La relève est assurée.

 

 
 
 
 
 
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Proxifoot : Tu nous avais dit en 2019 que tant que la passion serait là, il n’y aurait pas de raisons d’arrêter. Qu’est-ce qui a changé, à bientôt 42 ans ?
Samuel Izquierdo : J’ai deux garçons de 15 et 13 ans, qui sont aussi de grands passionnés de football. Le grand va commencer la saison en M15 à Servette et le deuxième va passer en FE13 à Meyrin. Donc je ne suis jamais loin des stades. Jusqu’à maintenant, c’était ma femme qui s’occupait des déplacements, mais maintenant j’aimerais les accompagner et suivre leur carrière d’un peu plus près. Parce que de 12 à 15 ans, l’évolution est énorme à cet âge-là, au niveau musculaire, athlétique, etc. Donc la raison principale est là, c’est l’emploi du temps. Parce qu’au niveau de la passion et du physique, ils sont toujours là. Je veux toujours avoir un lien avec le football, je ne sais pas encore comment. J’ai envie de rendre au foot tout ce qu’il m’a donné. Donner des entraînements individualisés par exemple, c’est quelque chose qui me botte bien, pour l’avoir fait avec mes enfants.

As-tu discuté de la suite avec le club sur une éventuelle intégration du staff ?
Je suis toujours en lien avec Yves Miéville. Autant lui que le président Mehdi Derouazi, ce sont des copains, même plus que des copains, on discute tout le temps. C’est plutôt moi qui mets le frein parce que je ne sais pas encore comment sera mon emploi du temps l’année prochaine. Je n’ai pas envie de m’engager dans un truc si je n’arrive pas à suivre. Pareil avec les vétérans, j’ai été contacté par plusieurs équipes mais la priorité n’est pas là pour le moment. Je veux faire les choses lentement et, une fois que je m’engage, je le fais à fond.

Lors d’un des nombreux derbys genevois disputés dans sa carrière

Tu as joué en actifs jusqu’à presque 42 ans, toujours à un joli niveau, entre la 1e ligue et la 2ème ligue. Comment expliques-tu cette longévité ?
Premièrement, c’est beaucoup grâce à me femme. Faire du football, c’est beaucoup de sacrifices avec les entraînements, la préparation, les matchs, et elle m’a permis de faire tout ça. Elle a été championne suisse de basket donc elle comprend très bien cette problématique. Souvent, les joueurs arrêtent parce qu’ils se prennent la tête au niveau de la famille. Dans mon cas, c’était déjà une barrière en moins. Ensuite, durant mon parcours, j’ai pu créer des liens avec beaucoup de personnes qui sont devenues des amis : Pierre-Yves Liniger, Yves Miéville, Mehdi Derouazi, etc. J’ai été en contact avec beaucoup de joueurs d’horizons différents, avec qui on avait une passion commune, et c’était tous des bons gars finalement. Ce bon esprit et cette bonne ambiance favorisent la longévité. Et pour finir, j’ai eu la chance de ne jamais avoir eu de gros pépins physiques. Être bien physiquement a toujours été une priorité. Si tu ne fais pas attention à ton corps, tu ne dures pas longtemps.

Tu as aussi partagé le vestiaire avec des joueurs qui n’avaient pas cette discipline, comme David Salan par exemple.
Oui (rires) ! Lui, il a du talent, c’est impressionnant. J’en ai connu des George Best dans le football amateur, comme Steve Alder ou David Salan. S’ils avaient fait attention, ils auraient pu jouer beaucoup plus haut. Mais il n’y a pas de vérité absolue, il faut de tout pour faire une équipe. Salan, il fait partie des belles rencontres dans le football. Comme Kevin Bua, aussi une rencontre exceptionnelle. J’ai joué contre lui quand il était à Servette M21, maintenant j’ai du plaisir à aller le voir à Tourbillon des fois. Je serai toujours reconnaissant au football pour les belles rencontres. Pareil avec Alex Geijo, on s’appelle toutes les semaines, ça fait partie des amitiés que je n’aurais pas eues sans le football.

A une période où les footballeurs actifs n’ont qu’une chose en tête : avoir 30 ans pour aller en seniors, tu faisais office d’exception. Que penses-tu de cette nouvelle tendance ?
Je ne veux pas dire du négatif, mais les vétérans ne m’ont jamais vraiment attiré. Il y en a qui vont en vétérans pour la compétition alors que la vision que j’ai de la catégorie, c’est le plaisir. Si tu veux rester compétitif, reste en actifs. Après, je n’ai pas connu les finales de Coupe Suisse comme Perly ou Veyrier ont connu. Peut-être que si Collex avait eu une équipe comme ça, je n’aurais pas le même discours. En tout cas, de mon côté j’ai toujours privilégié les actifs, je ne me voyais pas aller en vétérans. Et vu les événements qu’il y a eus cette année dans le championnat seniors, je n’aimerais pas finir sur des mauvaises notes comme ça après les bon moments que j’ai eus pendant ma carrière. J’ai une image du football qui est positive. Quand je parle de foot, j’ai des étoiles dans les yeux et c’est ça que je veux garder, je veux garder ce regard d’enfant. Je dis ça aujourd’hui, mais peut-être que dans deux ans ça va me manquer et tu vas me voir dans une équipe de vétérans (rires). Mais à l’heure actuelle, je me vois plus dans un staff de première équipe. J’ai envie de transmettre.

Tu as connu quelques succès dans ta carrière, quel est ton plus joli souvenir?
Il y en a énormément: les promotions, les finales de Coupe Genevoise, la Coupe de Suisse… et ces matchs de championnat où tu perds 1-0, tu égalises à la 85e et tu gagnes dans les arrêts de jeu. Je me rappelle l’année dernière quand Salan avait marqué un goal vainqueur à la 95e minute, j’avais l’impression qu’on avait gagné la Coupe du Monde. Au début du match, tu penses que tu vas prendre une rouste, tu fais le dos rond et t’arrives à gagner à la dernière minute, c’est des souvenirs magnifiques. Il y a Collex-Sion aussi, c’est vieux mais ça reste gravé. Même à Meyrin, quand on est montés en LNB, c’était impressionnant. J’ai pas un palmarès de fou, mais c’est difficile de ne garder qu’un souvenir. Même lors des saisons moins bonnes, quand tu joues contre la relégation et que tu te sauves à la dernière journée, c’est des émotions qui te prennent, tu vois les larmes couler à la fin du dernier match. Je me souviens d’avoir pris dans les bras Daniel Nieto qui nous avait sorti un penalty à Terre Sainte qui nous sauvait de la relégation. C’est magnifique de partager la même passion avec des gens et de voir qu’ils ont poursuivi dans cette voie, comme ce que fait Nieto à Onex maintenant. La richesse du foot, c’est que chacun apporte sa pierre à l’édifice et maintenant, je suis dans l’optique de redonner au foot tout ce qu’il m’a donné.

Tu as également côtoyé beaucoup de joueurs. Est-ce qu’il y en a un qui t’a plus marqué ?
Pour le côté talentueux, Alex Geijo et son frère David, que j’ai connus au Grand-Lancy, tu voyais déjà qu’ils avaient quelque chose de plus. Philippe Vercruysse à Grand-Lancy, c’était impressionnant. Il dansait, c’était dingue. A Perly, le gardien Pascal Rousseau avec ses dégagements, il pouvait marquer depuis son but. A Meyrin, il y avait aussi beaucoup de talent: Luis Moës, Talel Chedly, Youssef Wissam, Alban Noriega… Et à Collex, on a eu Luigi Pisino, et aussi Fabien Calleja qui pesait beaucoup sur les défenses.

Un dernier message que tu aimerais transmettre ?
Le football genevois est fait de passionnés. Quand tu connais les gens, tu vois qu’on est tous pareils. On aime la gagne mais si on se connaissait tous, je suis persuadé qu’on serait tous des potes. C’est ce qui me fait rester dans le milieu. Quand tu as la même passion, tu peux partager plein de choses.

Naissance: 4 octobre 1981 à Genève
Juniors: Plan-les-Ouates, Grand-Lancy (C inter, M-16)
Actifs: Grand-Lancy (1e ligue), Meyrin (1e ligue), Perly (2e ligue), Collex-Bossy (2e ligue, 2e ligue inter)

Photo de couverture: C.M. Trigo

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